André du Bois de Gennes

Un grand pilote de chasse et "presque" AS de guerre 1914-1918 (4 victoires),

saint-cyrien promotion de Montmirail,

Officier de la légion d'honneur, Croix de Guerre 1914-1918

1893 - 1975

Né à Liévin le 19 avril 1893, André de Gennes fait ses premières classes chez les Dominicaines d'Auteuil puis est mis chez les Jésuites, au collège de l'Immaculée Conception, rue de Vaugirard, où il étudie de 1900 à 1904. Lors de l'expulsion des Jésuites, il suit ceux-ci comme pensionnaire au collège Saint-Joseph de Marneffe, en Belgique, et y reste de 1904 à 1906. Très en avance pour son âge, son père l'envoie passer une année en Angleterre au collège tenu par les Jésuites à Beaumont où il reçoit l'Oxford and Cambridge Lower certificate Examination. Il revient en 1907 achever ses études à Marneffe. Il passe son baccalauréat ès-lettres à Paris le 26 juin 1909.

Se destinant à Polytechnique, il suit les cours des écoles spéciales préparatoires, d'abord au lycée Janson en 1909, puis au lycée Buffon en 1910. Il est brutalement interrompu dans ses études en février 1911 par une maladie causée par le surmenage et il part pour trois mois de convalescence à Lugelberg, en Suisse, qu'il prolonge par un séjour linguistique en Allemagne chez le professeur et madame Brachat, à Karlsruhe, où il retrouve sa sœur Cécile. A son retour, il entre en novembre 1911 en " corniche " à l'Ecole préparatoire Sainte-Geneviève, rue Lhomond (ancienne rue des Postes) à Paris. En septembre 1912, il est admis 157e sur 470 à l'Ecole spéciale militaire de Saint-Cyr. Il contracte alors le 9 octobre 1912 un engagement volontaire de quatre ans. Il est incorporé pour un service d'une année au 12e régiment de chasseurs à cheval en garnison à Saint-Mihiel. Il est promu brigadier le 10 février 1913 et maréchal des logis le 18 août suivant. Il entre à l'Ecole de Saint-Cyr le 10 octobre 1913 comme aspirant de cavalerie et en sort l'année suivante, promotion de Montmirail baptisée le 29 juillet 1914. Par décret du 12 août 1914 il est nommé sous-lieutenant pour prendre rang du 5 août précédent.

Il est affecté comme sous-lieutenant au 7e Chasseurs alors en garnison à Evreux dont il commande le 2e peloton du 6e escadron. A la suite de la mobilisation générale du 2 août 1914, il part pour le front avec son régiment le 5 août. Il participe à la reprise de l'offensive et à la bataille de la Marne du 5 septembre au 24 octobre, aux opérations sur l'Yser du 24 octobre au 4 décembre et à la campagne d'hiver en Champagne du 6 décembre 1914 au 10 mai 1915. Avec son régiment, il se replie ensuite en Artois pour un temps de repos

Il sollicite le 14 juin 1915 son passage dans le service de l'aviation et est envoyé comme élève à Pau le 9 août suivant. C'est de son chef pilote, le capitaine Collard, qu'il attrape le virus de la voltige, celui-ci lui faisant découvrir les charmes enivrant de toutes les acrobaties que l'on peut faire avec un avion et qui feront de lui un as du pilotage. Il passe le 18 novembre 1915 son brevet d'Aviateur militaire. Il est affecté le 25 novembre suivant à la réserve générale de l'aviation et rejoint la division Nieuport au Bourget. Il est nommé à l'escadrille n° 69 qu'il rejoint à Avesnes-le-Comte le 25 janvier 1916 et passe le 10 février à l'escadrille de chasse Spa 57 positionnée à Savy-Berlette (Pas-de-Calais). C'est dans cette dernière, commandée par le capitaine Duseigneur, qu'il fait son premier vol contre l'ennemi le 12 février 1916 et remporte sa première victoire le 14 mars.

Entre-temps, il passe le 26 février son brevet de pilote aviateur civil délivré par la Fédération Aéronautique Internationale. Il se fait déjà remarquer par des exercices périlleux qui lui valent sa première punition de 4 jours d'arrêt de rigueur et 8 jours de mise à pied pour le motif suivant : " Au cours d'un vol au-dessus de Saint-Pol a fait des pitreries dangereuses " ! Son escadrille est envoyée le 20 mars à Lemmes, près de Verdun (Meuse), et il en prend le commandement en l'absence du capitaine Duseigneur, évacué pour raison de santé.

L'escadrille Spa 57 avait adopté comme insigne une mouette blanche aux ailes tachetées de noir et largement éployées. André de Gennes arbore pour sa part comme insigne personnel peint sur le fuselage de son avion le point d'interrogation. C'était un moyen facile mais indispensable d'identification. Il vole à cette époque sur un Nieuport monoplace et a deux appareils à sa disposition.

Le 31 mars 1916, il prend en chasse et abat un avion allemand dont il blesse le pilote, qui n'était autre que Hermann Göring (Goering), futur maréchal du IIIe Reich ! (voir note 1)

juin 1917, le Hauptmann Hermann Göring (Goering) (2ème à partir de la gauche) devant un Albatros D-V

Cela lui vaut d'être promu lieutenant pilote aviateur le 2 mai pour prendre rang du 4 avril 1916 et d'obtenir sa première citation à l'ordre du 33e Corps d'Armée en date du 11 avril 1916 avec la remise de la croix de guerre (2 palmes et 1 étoile) :

" Jeune pilote qui, dès son arrivée, a livré de nombreux combats. Le 14 mars, attaquant 2 Albatros, a contraint l'un d'eux à atterrir précipitamment dans ses lignes. Le 31 mars, au cours d'une mission dans les lignes allemandes, a secouru un de ses camarades en prenant en chasse, à très courte distance, un Fokker et l'a forcé à interrompre son attaque et a contribué à sa chute. "

Lors de l'attaque de Douaumont le 22 mai 1916, il fait partie, avec le capitaine de Beauchamp et les lieutenants de Boutiny et Nungesser, des huit pilotes désignés pour détruire les huit Drachen (ballon captif d'observation) stationnés sur la rive droite de la Meuse. Leurs avions étaient des Bébé-Nieuport équipés pour la première fois des nouvelles fusées incendiaires mises au point par le lieutenant de vaisseau Le Prieur. Six drachen furent mis en flammes dont un à l'actif d'André de Gennes. Il ne tarde pas à être nommé pour la deuxième fois à l'ordre de la 2e Armée le 10 juin 1916 :

" Pilote plein d'entrain au combat. S'est signalé en maintes reprises par l'attaque audacieuse d'avions ennemis dans leurs lignes. Le 22 mai 1916, s'est porté à l'attaque d'un drachen ennemi qu'il a abattu en flammes. "

Lors d'une sortie le 1er juillet 1916, il est attaqué par les avions allemands. Il arrive à en descendre un, mais se trouve lui-même obligé d'atterrir dans les lignes ennemies ayant le moteur de son avion engorgé. Il a le temps de mettre le feu à son avion avant d'être fait prisonnier de guerre.

Sur le moment, on fut dans l'incertitude sur son sort. Un officier allemand complaisant fit passer par la Suisse l'avis qu'il était sain et sauf et traité avec égards (voir note 2). Son chef, le capitaine Duseigneur, écrit alors à sa mère :

" Il est si follement brave, si magnifiquement audacieux, si désireux de se dévouer jusqu'à la dernière limite, que je redoutais toujours pour lui un accident tragique. Alors, le savoir en sûreté, me sera une joie. Je suis heureux de pouvoir vous annoncer qu'une nouvelle citation à l'Armée m'est promise pour lui. Ce n'est qu'une petite récompense de tout ce qu'il a fait. La meilleure pour lui est la profonde affection comme l'admiration illimitée qu'il inspire à tous. "

La citation à l'ordre de la 2e armée est signée par le général Nivelle le 24 juillet 1916 :

" Pilote hors ligne par son habilité et son audace qui lui ont toujours fait solliciter les missions les plus périlleuses. A livré pendant le seul mois de juin plus de 20 combats aux avions ennemis qu'il a toujours harcelés jusqu'à ce qu'ils fassent demi-tour. Le 1er juillet, s'est porté à une très faible altitude à l'attaque d'un drachen qu'il a abattu en flammes. "

Durant sa captivité, il est plusieurs fois mis en cellule pour tentatives d'évasion et, comme il le racontera plus tard, " pour indiscipline savamment dosée ". Il change plusieurs fois de camp d'internement : Stenay, Fürstenberg, Mayence, Ströhen et enfin Strasbourg. Malgré les hostilités, il peut correspondre avec sa famille et envoyer des photos destinées à montrer que les prisonniers sont bien traités. Il est enfin libéré, puis rapatrié le 21 janvier 1919.

Dès le 23 janvier suivant, il est détaché au 1er groupe d'aviation à Dijon. Il est affecté le 4 avril à la 12e direction du Ministère de la Guerre à Paris. Il obtient une permission de détente pour se rendre à Pau du 26 avril au 8 mai et en profite pour réapprendre à voler. Il est ensuite détaché du 12 mai au 30 juin suivant à la Commission de Réception des Avions à Villacoublay dans le cadre de laquelle il fait à Pau un stage de ré-entrainement sur les avions de chasse de types analogues à ceux qu'il est appelé à piloter pour la Commission.

Par ordre du Maréchal Pétain, Commandant en chef les Armées Françaises de l'Est, il est nommé chevalier de la Légion d'Honneur le 22 juin 1919, cette nomination comportant en même temps l'attribution de la Croix de Guerre avec palme. Un arrêté ministériel du 14 octobre suivant vint lui confirmer cette nomination .

Le 31 juillet 1919 il reçoit l'ordre de rejoindre Dijon, et est affecté le 25 septembre au 1er groupe d'aviation. Après un temps d'entraînement, il est affecté à la Division aérienne de Neustadt et envoyé en opération en pays rhénan du 24 octobre au 15 décembre 1919.

Evoquant l'occupation de la Ruhr, le général Loustaunau-Lacau raconte :

" C'était tout de même quelque chose d'être là. De temps à autre, les Britanniques procédaient à d'importantes prises d'armes sur la place de la Cathédrale et, tandis que les escadrilles de Sa Majesté survolaient le Rhin, on voyait poindre à l'horizon le Morane du capitaine de Gennes, mon camarade de Saint-Cyr. Il arrivait en rasant les murs, fonçait entre les deux flèches du Dom et, se renversant sur une aile, s'en allait passer en trombe sous l'arche centrale du pont. Le maréchal Joffre vint, et ce fut du délire. Quelle image d'épinal ! Le vainqueur de la Marne, en dolman noir et culotte rouge, seul au milieu de la place, devant les tours qui symbolisaient les siècles germaniques ... " . (LOUSTAUNAU-LACAU, Mémoires d'un Français rebelle, Paris (R. Laffont), 1948, p. 53)

A son retour en France, il est affecté le 1er janvier 1920 au 1er régiment d'aviation de chasse à Thionville et nommé commandant de la 102e escadrille. C'est à cette époque qu'il adopta comme marque personnelle la lettre " Z " peinte sur le fuselage de son avion.

Devant partir en service commandé pour Dugny à la tête d'un détachement, il a à Thionville le 29 mars 1920 un terrible accident : son avion, un Spad VII, se met en vrille et s'écrase au sol, lui-même s'en sort avec des plaies aux cuisses et aux jambes, ainsi que des contusions dans la région orbiculaire droite avec arrachement de la paupière supérieure. Il est évacué à l'hôpital de Metz où il reste quinze jours, puis il bénéficie d'un congé de convalescence dans sa famille.

Bien que placé " hors cadres aéronautiques " le 1er juin 1920, il est désigné en juillet suivant par le colonel commandant la base de Thionville pour participer au championnat militaire de Tunis.

De retour à l'aviation, il est envoyé en mission en pays rhénan du 6 au 25 juin 1921, puis revient à Thionville. Depuis son jeune âge, il passait régulièrement des vacances chez des amis de ses parents, le colonel et madame de Maussion, au château de Pincé, en Anjou. Madame de Maussion, née Jeanne de Tertu, était à la fois une amie de pension de sa mère et une amie d'enfance de Madame Dufrenoy, née Suzanne de Saran (voir note 3). Celle-ci avait une fille, Germaine dite Mémette, qu'André de Gennes retrouvait à Pincé. Tous deux se marient à Paris le 24 novembre 1921, et leur fille Monique naît le 8 septembre 1922.

Avec quatre sergents d'infanterie il est envoyé en Norvège où il fait un stage de ski du 1er février au 10 mars 1922, d'abord à l'école des cadets de Heistadmoen, puis aux manœuvres d'hiver et enfin à la 1ère compagnie de la Garde Royale à Christiania (aujourd'hui Oslo). Il a laissé de ce séjour d'intéressantes notes sur la technique norvégienne du ski militaire.

De retour à Thionville, il est nommé commandant provisoire d'un groupe de chasse de 4 escadrilles et promu capitaine pour prendre rang du 25 décembre 1922 (décret du 27).

Le 2 octobre 1923, il est affecté au 4e groupe d'aviation d'Afrique. Il s'installe à Tunis avec sa famille, 5 boulevard Bab Menara, et c'est là que naît son fils Jean-Pierre le 18 octobre 1927. Il loue en même temps pour l'été une villa au bord de la mer, à La Marsa.

A peine installé, il doit revenir en France du 5 novembre 1923 au 5 février 1924 pour un stage de cours de photographie au Centre d'Etudes de l'Aéronautique de Villacoublay. Il prend de nombreux clichés et se spécialise dans la stéréographie.

Revenu à Tunis, il en repart à nouveau pour une opération au Maroc du 21 mai au 19 juillet 1925 dans le cadre de la guerre du Rif. Il reçoit le 6 janvier 1926 la Médaille Coloniale avec agrafe Vermeil Maroc, et recevra du roi d'Espagne le 20 janvier 1930 la Médaille de la Paix du Maroc.

Revenu à Tunis, il est envoyé en mission à Kairouan du 1er février au 3 février 1926, reçoit le 1er juin 1927 une lettre de félicitation du Ministre de la Guerre, obtient le 11 octobre suivant le brevet militaire d'observateur en avion, est encore envoyé en mission à Fort-Saint du 11 au 19 février 1928.

Son séjour en Tunisie se termine et il est affecté le 5 janvier 1930 au 3e régiment d'aviation à Châteauroux où il s'installe avec sa famille.

Le 26 novembre 1931, il est affecté au Ministère de l'Air, Etat-major général. Il vient s'installer à Paris avec les siens, 93 boulevard Murat.

Le 23 décembre 1933, il est promu officier de la Légion d'Honneur et décoré des mains du général Houdemon à l'occasion d'une grande prise d'armes sur le terrain d'aviation de Villacoublay.

Il quitte le Ministère étant affecté le 9 juin 1934 à la 2e escadre aérienne à Tours comme commandant de groupe. Il prend pension à Tours avec d'autres officiers, tandis que sa famille restant à Paris s'installe 85 rue La Fontaine. Il est promu le 25 juin 1934 chef de bataillon alias commandant.

Il est transféré à Chartres le 1er décembre 1936 où il assume successivement le commandement de la 2e escadre de chasse, puis de la 6e escadre et enfin de la 1ère escadre, pour revenir en 1939 à la 6e escadre.

Il est nommé le 23 février 1939 Officier d'Académie pour services rendus à l'éducation professionnelle.

Le 14 juillet 1939, il participe au défilé aérien au-dessus des Champs-Elysées à la tête de la 2e escadre, pilotant un Morane 236.

Le 27 août 1939, il est détaché au C.R. de D.A.T. à Rouen. C'est là qu'il se trouve lors de la déclaration de guerre du 2 septembre. Il part le 1er janvier 1940 pour le front comme officier supérieur adjoint au Lieutenant-Colonel de Moussac, commandant le groupe de chasse n° 25 à Aire-sur-la-Lys. Il participe comme chef de détachement à diverses opérations en Belgique et Hollande.

Le 11 juin 1940, il est affecté à la zone d'opération aérienne des Alpes à Toulon, comme commandant la 8e escadre ou sous-groupement de chasse n° 44 de la 3e région maritime. Sur ce dernier commandement, le capitaine de vaisseau Latham, chef du Service de l'Aéronautique Navale et ancien commandant de l'Aéronautique de la 3e Région Maritime, a fait le 6 août 1940 un élogieux rapport :

" Le Commandant de Gennes a pris le commandement du sous-groupement 44 en juin 1940. " Il a été chargé sous les ordres du Préfet maritime de la défense du littoral par l'aviation de chasse. Il a eu sous ses ordres les formations de chasse de la Marine (une ou deux escadrilles) et un groupe de coopération maritime (groupe 2/8). La IIIe Armée aérienne avait en outre mis à sa disposition, en cas d'alerte, certaines patrouilles à fournir par les groupes de chasse de l'Armée de l'Air stationnés dans la Région. " Le Commandant de Gennes exerçait son commandement du P.C. chasse installé à la caserne Gambin à Toulon. " Dès son arrivée le Commandant de Gennes a organisé avec activité et compétence ses liaisons avec les diverses formations susceptibles de coopérer à la défense du littoral. " Dans le commandement complexe qu'il exerçait, il a fait preuve de tact, de fermeté et d'une parfaite connaissance de son métier. " Il a su organiser dans les meilleures conditions la défense du littoral en tenant compte à la fois de l'organisation " Marine " existante et des besoins particuliers des formations de l'Armée de l'Air appelées à intervenir. " Je n'ai eu qu'à me louer des services du Commandant de Gennes qui a largement contribué au succès avec lequel les attaques aériennes italiennes sur la région de Toulon ont été repoussées. " Je serais heureux de voir récompenser cet Officier dont j'ai pu apprécier l'intelligence, les connaissances techniques et le parfait esprit de collaboration. "

A la suite de l'armistice et en application de la loi du 2 août 1940 abaissant les limites d'âge, il est mis en congé du personnel navigant pour une durée de cinq ans à dater du 20 septembre et versé dans les réserves de l'armée de l'air : il avait 47 ans. Par arrêté du 31 août, il est promu lieutenant-colonel de réserve, bien qu'appartenant toujours par le biais du congé spécial à l'active, pour prendre rang le 20 septembre suivant. Démobilisé depuis le 22 août, il se met en route pour rejoindre sa famille restée dans la maison familiale de Bellême où il arrive dans le courant de l'été.

Rendu à la vie civile par cette démobilisation, il entre en 1940 à la compagnie d'assurance Winterthur dont il est agent général pour l'arrondissement de Mortagne jusqu'en octobre 1941 époque où il part à Saint-Malo pour un an.

En octobre 1942, il regagne Paris avec les siens et s'installe 16 rue Christophe Colomb, dans un appartement prêté par des amis de Saint-Servan, M. et Mme Lavollée. Il entre au Club Alpin où il se dévoue pendant neuf ans comme secrétaire général adjoint. Il y côtoie les plus grands noms de l'époque : Maurice Herzog, Roger Frison-Roche, Paul-Emile Victor, Samivel ... Remercié dans des circonstances peu élégantes, il refuse avec dignité la qualité de Membre Bienfaiteur que lui avait décerné le Comité de Direction le 9 juin 1951 pour atténuer son éviction.

A l'expiration de son congé spécial et malgré sa demande de reprendre du service, il est admis le 20 septembre 1945 à faire valoir ses droits à la retraite et est rayé le même jour des contrôles de l'armée active. Il est cependant maintenu sur sa demande dans les cadres de réserve. Il obtient le 14 février 1947 une retraite annuelle de 55 449 francs avec jouissance depuis le 20 septembre 1945, pour 32 ans de services plus 30 ans de bonifications et de campagnes. Par décret du 25 août 1954 il est enfin définitivement rayé des cadres à compter du 19 avril précédent. Il est admis par décision du 26 novembre 1954 à l'honorariat de son grade de lieutenant-colonel et à celui d'officier du personnel navigant. Il totalisait 96 missions avec 1 241 heures de vol. Il pilota successivement 72 avions de marques et de types différents, notamment des Blériot, Morane, Spad, Nieuport, Breguet, Potez, Caudron, Dewoitine, etc.

Ne pouvant plus faire d'aviation, passion de toute sa vie, il se lance dans le vol à voile dès juin 1947 et s'inscrit au Centre national de Challes-les-Eaux. Il passe le brevet D en distance (55 km) le 23 mai 1948, et le brevet E en altitude (4 000 m) le 12 janvier 1949. Il continue à voler jusqu'en 1961, fréquentant les clubs de Moisselles, Beynes, Saint-Cyr, Saint-Auban-sur-Durance, La Ferté-Alais et Chavanay.

Très calé en astronomie, il est l'auteur en 1946 d'une " Carte de l'hémisphère nord en projection éclatée pour la représentation des lignes aériennes circumpolaires " et d'une " Carte boréale et équatoriale du ciel en projection éclatée ", permettant " de représenter sur une seule carte, avec un minimum de déformation, la totalité de la partie du ciel visible de France ".

Affaibli, et après de fréquents séjours au Val de Grâce ou à l'hôpital militaire de Versailles, il s'éteint à Gouy le 30 janvier 1975 à l'âge de 81 ans.

 

Il a fait partie d'un certain nombre d'associations et était : membre à vie de l'Association des Anciens Elèves du Collège Saint-Joseph de Marneffe, membre dès 1909 de l'Escadron de Saint-Georges (Société d'instruction et d'équitation militaires fondée en 1889), membre à vie du Club Alpin Français depuis le 26 avril 1920, membre à vie du Sky Club de Grande-Bretagne, membre perpétuel de La Saint-Cyrienne (Société Amicale de Secours entre les Anciens Elèves de Saint-Cyr) depuis le 19 janvier 1923, membre perpétuel avec qualité de fondateur du Cercle National des Armées de Terre et de Mer depuis le 9 novembre 1946, membre du Groupe Contact (club privé d'anciens officiers d'active ou de réserve de l'Armée de l'Air créé en 1948).

 

Note 1: André de Gennes raconta l'anecdote suivante: Probablement en 1942, il rencontre un ami sur Paris qui travaille au ministère de l'Air, et qui lui indique croiser souvent le maréchal Hermann Goering, lequel passe parfois dans ce ministère occupé. André de Gennes lui propose alors de lui demander s'il se souvient de la journée du 31 mars 1916. Plusieurs semaines plus tard cet ami lui répond avoir vu le maréchal, et que celui-ci très enthousiaste lui a immédiatement répondu qu'il avait été abattu par un pilote français. Le lien avec André de Gennes en ayant été déduit dans la foulée, le maréchal du Reich pria cet ami de lui transmettre une invitation très officielle à dîner, un soir prochain, perpétuant ainsi la tradition chevaleresque des aviateurs de la première guerre mondiale. André refusa cependant poliment, et ne rencontra ainsi jamais celui qui, ayant survécu à leur combat aérien, était devenu un des personnages les plus importants du 3ème Reich. A noter également que l'avion de Hermann Goering était peint en blanc, privilège rare, car cette peinture rationnée lui avait été accordée pour ses qualités d'as de la Luftwaffe (22 victoires en 1918).

Note 2: André de Gennes racontera plus tard, après avoir vu le film La Grande Illusion, qu'il avait reçu des aviateurs allemands le même accueil que celui fait dans ce film au capitaine de Boïeldieu, soulignant combien il y avait alors une certaine fraternité d'arme, une certaine conduite " chevaleresque " et une profonde admiration entre ces frères ennemis.

Note 3: Au cours d'un repas réunissant les trois ménages, Mme de Maussion dit : " Je suis née du Bois de Tertu ". Adolphe de Gennes lui répondit : " C'est curieux, nous ne sommes pas parents et pourtant je me nomme du Bois de Gennes ". Mme Dufrenoy déclara alors : " Le plus curieux, c'est que moi je suis une demoiselle du Bois de Saran ! ". Adolphe de Gennes bondit de sa chaise en s'exclamant : " Comment, mais voici des années que je vous recherche, car pour le coup nous sommes de la même famille ! " C'est ainsi que les deux branches de Gennes et de Saran se retrouvèrent.

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